Candeur et marketing
Comme tout un chacun, je fais mes
courses au supermarché. Et des fois, je craque pour les mirifiques
promotions "en tête de gondole"... Récemment, je n'ai pas su résister à
quelques DVD à des prix défiant toute concurence (quoique...). Me voila
donc l'heureux possesseur de deux films d'Abel Ferrara. Le rapport avec la SF, me direz-vous ? Facile : The body snatchers, la (mauvaise) adaptation de la nouvelle de Gibson, New Rose Hotel, ou encore le film "fantastique" The Addiction,
sur le thème de "Dracula chez les lacaniens". Bon, c'est vrai, Ferrara
n'a pas fait que des réussites dans ses incursions en terre
science-fictionneuse. Mais dans le récit réaliste, "mimétique", c'est
un cinéaste fabuleux. On peut citer le très connu Bad Lieutnant, mais pour ma part je trouve aussi que des films comme The Funeral, China Girl, King of New-York ou encore Ms. 45 (L'ange de la vengeance) sont tout aussi intéressants.
Bref, ce long préambule pour expliquer comment, ce soir, je me suis retrouvé devant mon moniteur pour regarder Cat Chaser.
Obscure histoire de fric et de fesses entre un ex-militaire US, une
jolie blonde (la charmante Kelly McGillis qui fit fantasmer tant
d'adolescents dans Top Gun) et un tortionnaire sud-américain.
Pénible. Laborieux. Tout juste de quoi faire un épisode bas de gamme
d'une série du dimanche après-midi sur TF1. Bin oui, c'est Ferrara :
des fois, il se plante avec un enthousiasme qui force le respect.
Comme
je suis plutôt optimiste, je me dis que j'ai peut-être loupé quelque
chose, alors je fouille du côté des bonus. Rien, si ce n'est
l'interview d'une illustre inconnue, maître de conférence en cinéma.
Allons-y ! Et là, la dame explique posément pourquoi ce film est
mauvais, raté, baclé, creux et (presque) sans aucun intérêt. En gros,
Ferrara s'est barré avant la fin, pour aller tourner King of New-York, et a laissé les producteurs se débrouiller avec un truc mal filmé et non monté. Soit.
Ce
qui me paraît fabuleux dans cette histoire, c'est la candeur presque
touchante des éditeurs du DVD. Voila des gens qui, par un souci sans
doute noble de mettre à la disposition du public l'intégrale de
l'oeuvre de Ferrara, édite en DVD un film qu'ils savent être un ratage.
Comme ils veulent aussi faire un peu d'argent, ils rajoutent sur la
jacquette : "Torride comme la passion, froid comme la mort", "une
réussite !", etc. Mais à la fin, saisi d'un remord qui leur fait
honneur, ils rajoutent comme bonus 10 minutes de reportage pour
expliquer que le film qu'ils proposent à la vente est un navet.
Quelque part, je trouve qu'il y a là une certaine beauté, une certaine élégance...
J-F S.