Serenity
Lectures en cours : Le goût de l'immortalité, de Catherine Dufour ; Uruad, de Jean-Christophe Issartier
Vu
hier soir le film de Josh Whedon, tiré de sa série (qui n'aura vécu
qu'une petite saison aux USA) Firefly. Du space-opera classique, avec
des ambiances de western au milieu (on pense parfois à la scène de la
taverne de Mos Esley dans Star Wars...). Les effets spéciaux font
parfois un peu au rabais, les scènes de combat sont un peu molles, mais
le film est servi par des personnages attachants, de bons dialogues et
un scénario plutôt bien fichu, même s'il n'est pas d'une originalité à
se rouler par terre.
Whedon est davantage un bon scénariste qu'un
bon réalisateur, et même ses tentatives de prouesses stylistiques (un
plan-séquence de près de cinq minutes en début de film) ne font pas
oublier le côté téléfilm de la réalisation.
Reste que, pour ceux qui
ont apprécié la qualité des scénarios de Buffy the Vampire Slayer
(j'en
suis), on retrouve la patte de l'auteur. Quelques clins d'oeil à la
jolie blonde de Sunnydale sont d'ailleurs présents dans le film : on
reconnaît dans le personnage de River le goût de Whedon pour les jeunes
filles expertes en arts martiaux. Plus drôle encore, le robot sexuel de
Mister Universe ressemble trop à Sarah Michelle Gellar pour que ça ne
soit qu'une coïncidence !
Au-delà de ces aspects geek, le scénario
manipule quelques idées intéressantes. Bien sûr, la trame de base est
celle de l'individu qui lutte contre l'autoritarisme du gouvernement
central, avec en pré-générique une charge carricaturale contre la
colonisation et l'impérialisme. On dirait parfois la propagande
officielle chinoise justifiant l'annexion du Tibet, mais la cible de
Whedon est sans doute davantage le gouvernement fédéral américain.
Plus
intéressant est le personnage du tueur envoyé sur les traces de
l'équipage de Mal. Son discour, lorsqu'il justifie ses meurtres par la
nécessité de créer un monde meilleur, semble faire écho à la fois au
terrorisme d'inspiration religieuse, style Al-Qaeda, et à la "croisade
du Bien contre le Mal" version Bush. Il est typique des "méchants" à la Whedon : joué par un acteur a priori plus dépourvu de charisme qu'une huître introvertie, il a suffisament de psychologie, de complexité et de dialogues pour en faire un personnage à la fois inquiétant et attachant, en même temps archétype du grand méchant et pourtant pas du tout monolithique.
Tiens, pour finir sur Buffy. Entendu ce matin sur France-Culture, dans la chronique de l'inepte Slama. "Buffy et les vampires" (sic) serait l'un des exemples de l'importance de la superstition et autres "peur du diable" aux USA par rapport à la cartésienne France. Si ce couillon de chroniqueur sortait parfois son nez des pages du Figaro ou des oeuvres complètes d'Aron, il aurait pu s'appercevoir que, dans Buffy comme dans beaucoup de films ou romans du même genre, le fantastique n'a qu'une valeur de métaphore. Il y a parfois des coups de pieds occultes qui se perdent...
J-F S.