Délires d'Orphée, de Catherine Dufour
En cours : Robert Charles Wilson, Blind Lake.
Dire que j'avais été un peu déçu par les trois premiers romans de la série Club Van Helsing est un doux euphémisme que seule pourrait expliquer l'hypocrisie qu'on nomme "bonne éducation". Mais, heureusement, tout n'est pas si noir en ce bas monde, et les directeurs de la collection ont eu la bonne idée de confier l'une des aventures des chasseurs de monstres à Catherine Dufour.
L'histoire de Délire d'Orphée est construite sur deux mythe grecs, l'Orphée du titre, natürlich, et Morphée. Dès la couverture, d'ailleurs, on est plongé dans la Grèce ancienne : l'illustration est tellement moche qu'on peut soupçonner Homère d'en être l'auteur. Mais passons. C'est le seul défaut du bouquin...
Nous sommes à Londres, où réside Hugo Van Helsing. Le chef des vampire slayers n'est pas content. Il vient de se faire voler un objet très vieux et très puissant, la lyre avec laquelle Orphée charmait les animaux, les hommes et même les dieux. Il fait appel à un mercenaire, lointain cousin du capitaine Achab (les éditions Baleine ont du apprécier ce choix prometteur), pour récupérer l'artefact. Mais le Maître de Bedlam semble dissimuler des informations précieuses à son employé.
Le récit met en valeur le talent de Catherine à créer des ambiances à la fois glauques et nostalgiques, à placer le lecteur dans un équilibre précaire entre la poésie sombre et la sordide trivialité de la vie. Son personnage principal réussit à être vivant, touchant et complexe tout en sacrifiant à tous les clichés et poncifs qu'exige le genre "littérature populaire" de la collection.
Enfin, on appréciera le twist final, plein d'élégance et en même temps presque drôle par son petit côté geek.
Juste pour finir sur l'autrice : son excellente nouvelle Immaculée conception, publiée dans Lunatique numéro 73 a remporté le grand prix de l'imaginaire lors des dernières utopiales. Comme quoi, le jury a bon goût.
Ah, et puis tant qu'on en est à parler de Lunatique, ruez-vous donc sur le numéro 76 de cette revue pour y lire le texte d'Anne Lanièce, La controverse. Après ça, vous ne pourrez plus regarder un escargot sans ressentir un certain émoi. Authentique (c).
J-F S.